Alors qu’un cycle Otto Preminger vient de s’ouvrir à la Cinémathèque française (30 août-8 octobre 2012), Sidonis s’apprête à commercialiser en DVD et Blu-ray Ambre (cette édition est annoncée avec des présentations de Patrick Brion et Jean-Claude Missiaen).
Tourné en 1947, il s’agit de l’adaptation du sulfureux roman de Kathleen Winsor, Forever Ambre, condamné en son temps pour ses passages érotiques et classé comme œuvre pornographique. La petite histoire raconte que Francis Spellman, alors Archevêque de New-York, et fraîchement élevé à la dignité cardinalice, condamna ce film pour immoralité -l’homme n’était pourtant pas un saint, si l’on en croit de nombreuses sources biographiques et les dires de J Edgar Hoover, qui détenait des fiches sur le religieux- et demanda aux fidèles de le boycotter. Il ne fut guère entendu, puisqu'il recontra le succès…
Ambre met en scène Linda Darnell dans le rôle-titre. Sans doute ne fut-elle pas une star de premier plan. Elle n’en mena pas moins une carrière prestigieuse pendant une dizaine d’années, tournant sous la direction des plus grands : Hathaway (L'odyssée des Mormons), King, Dwan, Wellman, Clair (C’est arrivé demain), Sirk, Ford (La poursuite infernale), Sturges, Mankiewicz (Chaînes conjugales, La porte s’ouvre), De Toth, Wise ou encore Walsh (Barbe-Noire, le pirate). Linda Darnell était une jolie fille et une actrice charmante à l’époque de L’aveu, dit d’elle Douglas Sirk. Elle était encore très jeune, à peine vingt ans. Elle sortait avec Howard Hughes, mais dès qu’il l’a laissée tomber, elle s’est mise à boire. Quand elle a joué dans un autre de mes films [The lady pays off, en 1951], elle était devenue une autre personne. C’est l’un des cas les plus tristes de l’histoire d’Hollywood […]. Vous savez que Linda Darnell est morte tragiquement ; elle avait une véritable phobie du feu, et c’est comme cela qu’elle est morte –morte dans un incendie à quarante ans.
Toujours chez Sidonis, on retiendra encore la sortie -également en DVD et Blu-ray- de Guérillas (1950) de Fritz Lang -que le cinéaste allemand affectionnait peu- avec Tyrone Power et Micheline Presle, et de L’Egyptien de Michael Curtiz, inspiré du célèbre roman de Mika Waltari, avec un casting féminin des plus séduisants, puisque l’on retrouve en haut de l’affiche les sublimes Gene Tierney et Jean Simmons.
Au début de la chronique que j’ai consacrée à La partie de dés de Frantz Osten, j’évoquais la mise en vente par Carlotta d’un coffret Guru Dutt, l'un des plus grands cinéastes indiens des années 1950. L’éditeur nous permet ici de (re)découvrir deux de ses chefs-d’œuvre, L’assoiffé (1957) et Le Maître, la maîtresse et l'esclave (réalisé par Abrar Alvi – 1962). Tous deux sont préfacés par Charles Tesson et sont accompagnés d’un documentaire de Nasreen Munni Kabir en trois parties, intitulé : A la recherche de Guru Dutt. Si on peut saluer l’initiative de Carlotta, on regrettera néanmoins que Fleurs de papier (1959) ne figure pas dans cette sélection.
Potemkine, pour sa part, nous permet de revoir deux œuvres emblématiques des années 1970, ayant pour décor la Sibérie. Tout d’abord Sibériade, d’Andreï Kontchalovski, un drame épique sur fond de révolution bolchévique, récompensé en 1979 à Cannes par le Grand prix. La seconde est Dersou Ouzala d’Akira Kurosawa, oscarisé en 1976. Cette superbe adaptation de La taïga de l'Oussouri, récit de voyage de Vladimir Arseniev, relate l’amitié qui unit l’explorateur russe et le chasseur hezhen Dersou.
Dans sa collection Classics Confidential, Wild Side annonce la sortie du Grand passage (1940) de King Vidor, adapté du roman éponyme de Kenneth Roberts. Ce film, qui se déroule pendant l’épisode colonial de la guerre de Sept ans, raconte l’histoire de Langdon Towne (Robert Young) et Hunk Mariner (Walter Brennan), deux jeunes gens engagés dans une expédition commandée par le Major Rogers (Spencer Tracy) pour détruire un village indien.
Le grand passage, premier film en couleur du réalisateur, devait faire partie d’un diptyque dont le second volet ne fut jamais tourné. Longtemps sous-estimé, en raison de son incroyable brutalité pour l'époque, il est aujourd’hui considéré comme l’un des plus lucides sur le caractère génocidaire des guerres contre les Indiens. Cette œuvre permis à Sidney Wagner et William V Skall d’être en compétition en 1941 pour l’Oscar de la meilleure photographie, dans la catégorie couleur.
Comme toujours dans cette collection, le film est accompagné d’un livre de 80 pages intitulé Dans la gueule du lion (Jean Ollé-Laprune). Parmi les autres bonus, signalons un making-of et un épisode de la série Northwest passage (1958-1959), inspirée du film, réalisé par Jacques Tourneur.
La société Artus Films poursuit quant à elle son exploration du cinéma bis, pour lequel je confesse éprouver un attrait aussi secret que coupable. Eh oui ! il n’y a pas que Dreyer, Murnau ou Tarkovski dans ma vie... Voilà pour mon coming out… Ainsi, après les coffrets Les dinosaures attaquent !, Les montres viennent de l’espace et Destination mars, nous propose-t-elle avec Voyages vers la Lune
Dans le même genre, signalons enfin la sortie chez Bach Films d’un coffret Roger Corman. A côté de titres connus -comme La petite boutique des horreurs (1960)- figurent dans cette sélection quelques raretés, tels Les mangeurs de cerveau (tout un programme !) ou La femme guêpe. Si, là aussi, les copies ne sont sans doute pas d’excellente qualité, il n’existe guère d’autre solution pour voir ces films, qui bénéficient là aussi de quelques suppléments, dont des présentations du Professeur Thibaut, ex-chroniqueur de la défunte revue Brazil.
Ah ! j’oubliais… Il paraît qu’une intégrale Nolan est sortie cet été. Sauf erreur de ma part, on désigne par ce terme l’édition complète des œuvres d'un auteur, d’un créateur. Si tous les films du nouveau démiurge du Septième art sont dans ce coffret, cela veut dire qu’il n’y en aura pas d’autre, donc qu’il aurait décidé d’arrêter le cinéma. Une sage décision…